Les fêtes de fin d'année approchent très vite... Je vous les souhaite excellentes, pleines de chaleur et d'amitié. Bientôt les jours vont rallonger, d'un saut de puce, dit-on, à la Sainte Luce. C'est l'occasion pour moi de vous offrir en partage ma nouvelle "Fiat Lux", retenue parmi les treize lauréates du Concours de la Nouvelle George Sand.
Alors, que la lumière soit !
Fiat Lux
« Les sources, ça ne se dit pas. C’est un secret qu’on ne confie à personne. Un secret que j’emporterai peut-être avec moi. Pas par égoïsme. Mais pour laisser aux autres la joie de les redécouvrir. »
Marcel Pagnol.
Longtemps ma vie a commencé après mon cinquième anniversaire. Je veux dire par là qu’avant cette date, je n’avais aucun souvenir, aucune image. La plupart des adultes font remonter leurs premiers souvenirs d’enfance, vagues ou au contraire étonnamment précis, à l’âge de trois ou quatre ans. Pour moi, rien. Pas la moindre réminiscence née d’un parfum ou d’une saveur. Jamais aucune musique n’éveillait en moi les échos de ce passé lointain. Le néant. Jusqu’à ce jour – j’avais un peu plus de cinq ans – où la panique s’était emparée de moi au parc, devant le bassin où les autres gamins faisaient naviguer des bateaux loués au kiosque voisin. Je me rappelle très bien les hurlements que j’ai poussés lorsque ma nourrice a voulu me conduire au bord de l’eau. Lorsque j’y songe, je peux encore sentir, dans mon corps d’adulte, la tétanie de mes muscles d’enfant. J’ignore si j’avais fait de telles crises auparavant, mes parents ne m’en ont jamais rien dit et ils ne sont malheureusement plus là aujourd’hui pour répondre à mes questions. Ce qui est certain, c’est que je datais de ce souvenir premier le début de ma vie consciente et de mon aquaphobie.
Ma thérapeute me répétait qu’on ne pouvait pas imputer ce déficit mémoriel à l’amnésie infantile : pour elle, tout était lié, ma peur panique de l’eau et mon absence de mémoire ancienne. Pour résoudre mes problèmes, il me fallait retourner aux sources du trauma originel, prétendait-elle.
Le retour aux sources, la panacée. Voilà qui m’a toujours laissée dubitative. Je me suis délectée à m’en lécher les doigts d’articles racontant les désillusions de ces citadins qui, fraîchement déconfinés, avaient quitté les villes pour retrouver une vie plus saine et authentique, en harmonie avec la nature. Il n’a fallu que quelques mois pour que leurs rêves bio de production de confitures artisanales s’achèvent en totale déconfiture. Que n’avaient-ils lu Pagnol ! Jean de Florette espérait déjà « cultiver l’authentique ». Pauvre fou, plié sous le poids de ses chimères autant que sous celui de sa bosse, qui usa sa vie en allers-retours à une source trop lointaine et l’acheva, à la dynamite, sous une pluie de pierres sèches.
Je me méfiais donc toujours de ces recherches à contre-courant, d’autant que des années de thérapie comportementale et cognitive m’avaient finalement appris à gérer ma phobie : j’étais à présent capable de supporter la vue d’une étendue d’eau et même de m’en approcher. Seul son contact était rédhibitoire. Je pouvais profiter du transat au bord de la piscine pendant que mes amis s’y ébattaient et il arrivait même que le spectacle de leurs plongeons plus ou moins gracieux me fasse rire. Alors pourquoi chercher plus loin ? Qui sait ce qui m’attendrait lorsque j’aurais remonté le cours du temps ? Je craignais d’ouvrir une boîte de Pandore et de laisser s’échapper une nuée de souvenirs, pareille à un essaim de frelons. Pour vivre heureux, fermons les yeux. Ce n’est sans doute pas glorieux, mais que celui ou celle qui n’a jamais pratiqué l’art subtil de l’esquive me jette la première pierre.
Des quatre fleuves de la fontaine du Bernin sur la piazza Navona, mon préféré a toujours été le Nil. De son visage, on ne distingue que le nez, la bouche et la barbe fournie. Un pan de sa toge couvre sa tête et dérobe son regard pour signifier que personne n’a percé le secret de ses sources. Cherche-t-il, de son bras tendu, à arracher le voile qui l’aveugle ? Pour moi, rien n’est moins sûr. J’y vois plutôt une mystérieuse pudeur qui fait tout son charme. Et s’il ne suivait aveuglément son instinct mais était doué de raison, le saumon réfléchirait peut-être à deux fois avant de lutter contre les torrents au prix d’efforts infinis pour finir sous les griffes acérées d’un grizzli vorace. D’autant que si par miracle, il mène à bien sa quête et atteint sa source natale, c’est pour y mourir d’épuisement, après le fugace plaisir d’avoir accompli son devoir de reproduction. J’avais ainsi développé un argumentaire hétéroclite me confortant dans mon déni et m’évitant d’affronter mon passé.
Enfin, tout cela c’était avant. Avant que mes nuits n’éclatent, atomisées par ces cauchemars récurrents. Dès que le sommeil prend possession de moi, je me noie. Je lutte en vain contre cette eau glauque qui envahit ma bouche et mes poumons, comme je lutte en vain pour me réveiller. Sous mes paupières closes, des phosphènes verts et dorés m’éblouissent et abolissent toute perception du haut et du bas. Je suis ballottée, pantelante, par des tourbillons glacés, de longs filaments me frôlent en visqueuses caresses qui me font suffoquer de dégoût et de terreur. Au bout d’une éternité, juste avant que tout s’obscurcisse, je me sens soulevée et je me dresse dans mon lit, à bout de souffle, trempée de sueur. La première fois, j’ai voulu croire à un cauchemar isolé, mais depuis le même scenario se répète chaque fois que je ferme les yeux. Je m’épuise à fuir le sommeil qui finit par me rattraper sans m’apporter aucun repos.
La mort dans l’âme, je me suis résignée à retourner consulter ma thérapeute. Je l’avais délaissée ces derniers mois, pensant pouvoir enfin me passer d’elle. Elle n’a pas été surprise de ma visite. « Il est grand temps de cesser la politique de l’autruche, a-t-elle asséné après avoir écouté le récit de mes cauchemars. Vous voyez bien que votre inconscient ne vous laissera pas en repos tant que vous n’aurez pas découvert ce qu’il cherche à vous faire comprendre. » J’étais de toute façon trop au bout de mes forces physiques et mentales pour discuter, j’ai donc accepté ce que j’avais jusqu’alors refusé : une séance d’hypnose régressive. J’ai toujours regardé l’hypnose avec un mélange de scepticisme et de fascination, comme une technique attirante et effrayante à la fois. Il se trouve que je m’y suis révélée particulièrement réceptive.
Je passe ici toute la mise en situation et l’induction qui précédèrent la remémoration, pour en venir à l’essentiel : les bribes de souvenirs que j’ai pu faire remonter à la surface de ma conscience. Pour la première fois, je me suis rappelé quelques images précédant l’épisode traumatique du bassin. Au commencement, l’obscurité totale, un écran noir mais de vagues réminiscences olfactives, une odeur d’humus, de terre mouillée, et auditives, des chants d’oiseaux principalement, mais aussi comme une comptine enfantine dont les paroles m’échappent. Puis j’ai revu les phosphènes de mon cauchemar mais cette fois, ils n’ont pas été suivis de cette obscurité qui m’oppresse chaque nuit. Au contraire, la lumière s’est faite progressivement, comme lorsque qu’on pousse lentement le variateur d’une lampe halogène. Toujours cette sensation d’être secouée, mes bras pendent et ma tête soubresaute, mais je ne souffre pas. Le soleil chauffe ma peau. J’ai l’impression douce de flotter dans les airs, comme si je m’apprêtais à m’envoler. Au milieu de cris étouffés, je discerne des ombres qui dansent autour de moi, se penchent vers mon visage. Leurs traits s’éclaircissent peu à peu et je reconnais mes grands-parents.
Je suis sortie exténuée de cette expérience, comme vidée de toute substance, mais étonnamment calme avant que l’agitation ne me reprenne tandis que je tentais d’analyser ces visions. Car si elles n’avaient pas apporté de réponses, elles avaient soulevé un flot de questions. Que venaient faire mes grands-parents dans cette histoire ? Je n’étais pas proche d’eux. Lorsque j’étais enfant, nous habitions à Tours. Ils nous rendaient visite à trois ou quatre reprises dans l’année, pour Noël, Pâques, mon anniversaire sans doute. Ils possédaient une maison dans un petit village sur les bords de l’Indre mais, malgré cette proximité, les relations restaient distantes. Je crois n’être jamais allée chez eux, en tout cas je n’en ai aucun souvenir, même de l’époque dont je me souviens bien. Lorsqu’ils sont décédés, à peu de temps l’un de l’autre, je poursuivais mes études à l’étranger, trop loin pour faire le déplacement et assister aux obsèques. Leur surgissement depuis le plus profond de mon inconscient me plongea dans un abîme de perplexité que je partageai avec ma thérapeute.
« Justement, dit-elle, il n’y a pas de hasard. Maintenant que le processus est enclenché, si vous en avez la force, il serait peut-être bon de retourner sur les lieux où ont vécu vos grands-parents. Il est probable que la source de votre traumatisme se trouve là-bas. Vous avez réagi très positivement à la séance et je doute que nous parvenions à aller plus loin par l’hypnose, les dernières barrières semblent trop solides. Je pense que seule la confrontation avec le réel pourrait les faire tomber. »
La nuit suivante, pour la première fois depuis des semaines, j’ai dormi d’un sommeil paisible. À mon réveil, ma décision était prise. L’Ascension m’offrait justement un long week-end pour prendre la route du passé.
J’ai volontairement délaissé les grands axes, préférant les départementales, plus nonchalantes, qui laissent le temps d’apprivoiser le paysage. En franchissant la Loire, « la Demoiselle » comme l’appellent ses bateliers, j’ai quitté la Bourgogne pour entrer en Berry. Après des kilomètres au cœur des vignobles de Sancerre, où le vert du feuillage naissant ne masquait pas encore le gris brun des ceps, j’ai traversé le Cher avant de me perdre dans la monotonie des plaines céréalières autour d’Issoudun. Il me tardait d’atteindre l’Indre et sa Vallée-Noire, ainsi nommée par George Sand. La Vallée-Noire, la magie de ce nom me la faisait imaginer peuplée de « Meneux-de-Loups » et de « Fades », les fées de ce pays. Insensiblement, le paysage s’est adouci en souples vallonnements aux hauteurs boisées, en pâtures mousseuses, bordées de haies, fleuries d’aubépines et d’églantiers. L’air même semblait plus léger. Je pouvais deviner sans la voir, la présence fraîche de ruisseaux vivants.
En fin d’après-midi, je suis arrivée dans le village de mes grands-parents. Quelques maisons aux tuiles de terre brune et aux murs de pierres dorées par la lumière qui commençait à décliner. J’ai ramassé sous un pot de fleurs la clé du gîte que j’avais loué. Mon hôtesse m’avait prévenue de son absence et nous étions convenues de nous rencontrer le lendemain soir. J’ai déposé mes affaires et suis partie à la recherche de l’ancienne demeure de mes grands-parents. Je l’ai trouvée sans peine, un peu à l’écart, au bout d’une impasse. La cour était ceinte de murs mais à travers la grille du portail, j’ai découvert une bâtisse aux volets fermés. Rien ne la distinguait des autres maisons typiques de la région. Les nouveaux
propriétaires étaient de toute évidence absents. J’avais espéré leur demander l’autorisation de la visiter, je devais faire mon deuil de cette idée. Cette déception vint s’ajouter au fait que cette vision ne m’évoquait rien. Je m’étais préparée à un choc émotionnel mais j’avais beau solliciter mon imagination, projeter l’image de mes grands-parents sur le perron désert, aucun souvenir ne se faisait jour. Désemparée, j’ai regagné le centre du village. Autour de l’église, se serrent les tombes. Ce village garde ses morts en son cœur, protégés d’un modeste muret. Des cymbalaires aux délicates fleurs mauves, pareilles à de minuscules pensées, l’ont colonisé. La fragilité obstinée de ces plantes qui puisent leur vie dans la stérilité des pierres me touche. J’ai parcouru les allées gravillonnées du cimetière jusqu’à la sépulture de mes grands-parents. « Ici reposent en paix Gilbert D*** ; Sylvaine, son épouse ; Marie, sa sœur, dans l’amour de Notre Seigneur Jésus-Christ ». L’épitaphe m’a rappelé combien ils étaient pieux, d’une piété qui n’était pas exempte de superstition. À chacune de ses visites, ma grand-mère m’offrait une médaille religieuse. Je crois bien que toutes les saintes et tous les saints du paradis y sont passés. Je recevais ce présent apotropaïque avec politesse et déception dissimulée, puis sainte Thérèse ou sainte Rita s’en allaient rejoindre saint Christophe et tous les autres dans une petite boîte conservée par ma mère. Mes parents ne m’ont pas élevée dans la religion, ce qui explique peut-être les liens si ténus qu’ils entretenaient avec mes grands-parents. Pas plus que devant leur maison, le pèlerinage sur leur tombe n’a réveillé de souvenirs refoulés. J’ai simplement repensé à Marie, la sœur cadette de mon grand-père. Je ne l’avais jamais rencontrée mais, lorsque j’étais enfant, j’avais entendu parler d’elle, à demi-mots, dans des conversations qui cessaient à mon approche. Elle était simple d’esprit, comme on disait pudiquement, ne parlait pas, mais fredonnait du matin au soir des prières populaires sur des airs enfantins. Elle a vécu avec mes grands-parents jusqu’à leur mort, puis elle a été placée dans un hospice où elle est décédée à son tour.
Lorsque je suis rentrée au gîte, mes sentiments étaient partagés. La déception première cédait la place au soulagement de ne pas m’être confrontée à un passé indésirable. Je me sentais sereine, comme je ne l’avais pas été depuis longtemps. À quoi bon alors risquer de débusquer les démons assoupis ? La nuit paisible qui suivit me conforta dans cette pensée. Je me réveillai de très bonne heure après un sommeil réparateur, dépourvu de rêves. La veille, j’avais trouvé sur la table des dépliants touristiques, comme il est de coutume d’en laisser dans les chambres d’hôtes. L’un d’eux proposait une randonnée aux alentours. Je décidai d’y consacrer la journée, sans autre but que celui de la promenade et de la découverte de la campagne environnante.
Le long du chemin quittant le village, de hautes graminées dressaient leurs tiges raides, couronnées d’épillets, au-dessus du feuillage vert sombre des hellébores et des fleurs jaunes du lotier. De précieuses orchidées sauvages posaient çà et là une touche pourpre dans cette végétation rustique. Peu à peu, encore vaporeuses de brume dans le petit matin, des prairies humides sont apparues, closes de haies de saules torturés et d’épines fleuries, déjà bourdonnantes. Puis le sentier s’est enfoncé au milieu d’un petit bois. En pénétrant sous les arbres, j’ai fait fuir un geai qui s’est envolé en jasant sa colère. Les autres oiseaux invisibles n’ont pas cessé leur chant et j’ai commencé à éprouver une étrange et vague sensation de déjà-vu. Tamisée par les feuilles, la lumière émaillait l’ombre glaucescente du chemin d’une mosaïque d’or. J’ai ralenti mon pas, attentive aux sons et aux odeurs du sous-bois. Une passerelle de planches disjointes enjambait un petit ruisseau et, juste après, un embranchement du sentier invitait à en remonter le cours. Je l’ai suivi sans réfléchir, comme on suit sans méfiance une personne familière. La pente était douce et je suis arrivée sans efforts à un bassin rectangulaire, entouré d’une margelle de pierre luisante : un ancien lavoir, alimenté par un mince filet d’eau, naissant quelques mètres plus haut entre des blocs de granit moussus. La source se dissimulait sous une arche de pierres et de fougères. Près d’elle, la statue naïvement peinte d’une femme en extase levant vers le ciel des yeux absents et un petit panneau de bois pyrogravé : « Source Sainte-Lucie ». Autour de la sainte, les arbustes s’ornaient d’une multitude de rubans aux couleurs fanées pour certains, mais aussi étonnamment fraîches pour les autres, témoignant d’une dévotion toujours vivace. Sous le charme de ce lieu, je me suis assise, habitée d’un grand calme comme d’une évidence. Lucie veillait sur moi, mais sans doute aussi une antique naïade, une fée ou une déesse mère, car les sources ont toujours été magiques et féminines. L’Origine du monde, l’eau perlant en secret sous la mousse, comme le désir aux lèvres d’un sexe humide. J’ai dû rester des heures près du petit sanctuaire, sans penser à rien, jouissant simplement de cette rencontre comme d’un rendez-vous longtemps espéré. Avant de partir, j’ai tendu mes mains en coupe sous la source et je me suis baigné le visage. Pour la première fois au contact de l’eau, un frisson de plaisir a parcouru mon corps. J’ai regagné le village, le cœur léger, en longeant la rive de l’Indre bordée d’aulnes et de peupliers, l’esprit ailleurs, sans vraiment profiter du spectacle de ses moulins.
Devant le gîte, au soleil sur un banc, m’attendait mon hôtesse, une femme sur la soixantaine finissante. Dans la sorte d’état second où je me trouvais, j’avais oublié jusqu’à son existence. Elle m’accueillit chaleureusement.
— Je craignais de vous avoir manquée, fit-elle en se levant.
Tout en me parlant, elle me dévisageait avec une insistance gênante. Je répondis quelques banalités pour cacher mon trouble. Elle tourna autour du pot un moment encore, puis se lança :
— C’est sûr, vous êtes bien Cécile D***, la petite-fille de Gilbert et Sylvaine ! Il y a un air de famille qui ne trompe pas.
— Vraiment, vous trouvez ?
— Oh que oui ! On se demandait tous si vous reviendriez un jour.
— Tous ? Qui ça, tous ?
— Mais tout le monde au village, voyons. Vous êtes une célébrité par ici !
— Une célébrité, moi ?
— Et comment ! Je ne devrais peut-être pas vous dire ça, mais on vous appelle la Miraculée.
Comme je restais interdite, elle continua :
— Il faut dire que vous étiez presque morte quand on vous a repêchée au lavoir de Sainte-Lucie.
J’ai senti mes jambes se dérober et me suis assise sur le banc.
— Je suis tombée dans le lavoir ?
— Oui, vous aviez échappé à la surveillance de vos grands-parents et vous aviez suivi la pauvre Marie jusqu’à l’oratoire. On ne sait pas trop ce qui s’est passé là-bas… Heureusement, Gilbert, votre grand-père, est arrivé à temps et il a réussi à vous réanimer, mais de justesse !
Mon passé s’éclairait d’un jour nouveau, c’était donc là l’origine de mon aquaphobie.
— Effectivement, c’est un miracle que je ne me sois pas noyée, ai-je péniblement articulé, encore sous le choc de cette révélation.
— Vous pouvez le dire ! Mais, ça, c’est surtout un coup de chance, le miracle, ce n’est pas ça.
— Mais enfin, de quel miracle parlez-vous ?
Elle me fixa intensément, comme si je me moquais d’elle, puis soupira avant de reprendre d’une voix plus douce :
— Se peut-il vraiment que vous ayez tout oublié ? Vous étiez née aveugle, mais quand on vous a sortie de l’eau et que vous avez repris connaissance, vous aviez retrouvé la vue.
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