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En visite chez Esther.

Allez, je peux bien vous le dire, ce n’est pas vraiment une surpriseLa fin de Hareng au sang le laissait présager : nous allons retrouver Leonora dans le troisième volume, dont j’espère terminer bientôt l’écriture.

Comme vous le savez, Leonora est restauratrice de tableaux, c’est pour cela que Lucien l’avait rencontrée à la National Gallery, où ils étaient venus tous deux étudier des œuvres de Crivelli.

Or, dans ce que je suis en train d’écrire, elle doit procéder au décrassage d’une toile. Pour essayer de ne pas vous raconter trop de bêtises, je me suis bien sûr renseignée sur les techniques de restauration. Or les renseignements que j’ai trouvés sur internet étaient trop imprécis et ne répondaient pas aux questions que je me posais. Ou bien, au contraire, ils s’adressaient à des professionnels, et là, je n’y comprenais rien !


Dans ce cas, rien ne vaut les explications « en direct » d’une professionnelle, et c’est ainsi que j’ai eu le plaisir de rencontrer Esther Albendea, conservatrice et restauratrice d’œuvres à côté de Dieppe.

Esther a tout de suite répondu avec enthousiasme quand je lui ai écrit pour lui demander si elle accepterait de m’aider dans mes recherches. Elle m’a très gentiment invitée à visiter son atelier, où je me suis donc rendue hier.

Sans entrer dans des détails techniques, je voulais vous faire partager ma visite grâce à quelques photos.


Le décrassage consiste en un simple nettoyage de la surface du tableau. Il ne s'agit pas d'alléger le vernis, mais seulement de retirer la saleté superficielle, causée par la pollution, la fumée, les mouches... Esther devait justement procéder au décrassage d'une toile du XIXe siècle et elle m'avait attendue pour commencer.

Les techniques de restauration évoluent bien entendu en fonction des nouvelles découvertes. Pour le décrassage, l'évolution se fait en direction de ce qui utilise le moins de solvants chimiques possible. Depuis quelques années, la technique qui a tendance à s'imposer pour le décrassage repose sur l'utilisation de solutions aqueuses tamponnées, c'est à dire de solutions dont le pH est stable et ne risque donc pas de varier au contact du pH du tableau.

Car tout est ici une histoire de pH !

Il s'agit tout d'abord de mesurer le pH du tableau, pour ensuite trouver la solution au pH le mieux adapté à son décrassage. Cela dépendra évidemment du tableau : les pH seront différents selon qu'il s'agira d'une peinture vernie, d'une peinture à l'huile ou d'une peinture à la détrempe.

On n'utilisera pas la même solution pour décrasser un Crivelli et un Caravage !

Les solutions peuvent être à base d'acide citrique, d'acide acétique, de Tween 20 (polysorbate), de triammonium citrate... On peut également ajouter à ces solutions un gélifiant, afin d'obtenir un gel qui ne risquera pas de détremper la peinture en pénétrant de manière intempestive.

Balance de précision, pH-mètre, béchers, pipettes graduées, eau déminéralisée, assortiment de poudres de perlimpinpin... Tout est prêt !


Bref, vous l'avez compris, tout cela est un travail de spécialiste et je vous déconseille d'utiliser votre vinaigre, même balsamique, pour décrasser le Van Gogh, hérité de votre arrière-grand tante Cunégonde !

Afin de trouver la meilleure solution, Esther va procéder à des tests dans des petites fenêtres, en appliquant la solution à l'aide de coton hydrophile enroulé sur un bâtonnet de bois.




Une fois que le produit est passé et ensuite rincé à l'eau déminéralisée (appliquée à l'aide d'un nouveau bâtonnet), la fenêtre test est repérée au crayon aquarellable avec le nom du produit utilisé :


Sur la photo suivante, Esther teste une deuxième solution sous la première fenêtre.


Préparation d'un nouveau bâtonnet pour un nouveau test :


Après le test, chaque coton imprégné d'une solution, ainsi que celui qui a servi à son rinçage, sont conservés comme témoins. Sur la photo suivante, on peut voir les trois paires de cotons qui correspondent aux trois fenêtres matérialisées sur le tableau :



Une fois la solution optimale trouvée, le décrassage pourra se poursuivre grâce aux bâtonnets, ce qui est fort long, mais on pourra aussi utiliser des tampons qui permettront un travail plus rapide :



Voilà pour les très grandes lignes du décrassage.


Écrire est (souvent !) un plaisir, rencontrer les lecteurs dans les salons ou lors de dédicaces en est un autre, dont les mesures liées à la Covid nous privent malheureusement. Pour mes recherches, j'ai pu hier découvrir un nouveau plaisir : celui de rencontrer des gens passionnants et passionnés, heureux de partager leur savoir !


Pour en savoir plus, à défaut de visiter son atelier, je vous invite à visiter le site d'Esther Albendea, que je remercie encore.

C'est ici : atelieralbendea.com


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